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Femmes politiques

Alexandria Ocasio-Cortez, ou l’art de faire de la politique

Crédits photo © William B. Plowman / NBC

Née dans le Bronx à New-York et issue d’une famille modeste latino-américaine, Alexandria Ocasio-Cortez était serveuse avant de devenir la plus jeune élue au Congrès des États-Unis. Grâce à son engagement, sa maîtrise de l’art de la rhétorique, des réseaux sociaux et du storytelling, l’étoile montante du parti démocrate mène une politique populaire de proximité et d’empowerment, en proposant une alternative au système politique actuel victime de corruption. Ses différents échanges avec des personnalités telles que Greta Thunberg, Megan Rapinoe, Donald Trump ou Mark Zuckerberg, permettent à Alexandria Ocasio-Cortez de construire et consolider un ethos puissant et célèbre. Retour sur son parcours et sur les raisons de sa réussite.

Cap sur le congrès, le parcours atypique d’AOC

Son passé avant les élections

Alexandria Ocasio-Cortez a commencé à être serveuse dans un bar spécialisé dans les tacos et la tequila (Flats Fix, New-York) au début de la crise financière, en 2008. Son père était décédé, elle travaillait pour une association, mais cela ne suffisait pas car elle et sa famille risquaient de perdre leur maison, elle devait payer le prêt étudiant et le prêt de l’hypothèque. Dans le documentaire Cap sur le Congrès, important moyen de storytelling pour AOC, celle-ci commente : « On fait de son mieux pour survivre. Cela a été une réalité pour des millions de gens aux États-Unis ». Elle pense également que les gens ne voient pas le métier de serveuse comme un, entre guillemets, « vrai travail ». Toutefois, son expérience en hôtellerie l’a très bien préparée à cette course que sont les élections. Elle a l’habitude des reproches, des personnes qui veulent la faire se sentir mal. Elle a l’habitude d’être debout 18 heures par jour et de travailler sous pression.

On nous appelle « la classe ouvrière » pour une raison, car on travaille non-stop. Les Américain·es ne demandent pas la Lune, ils demandent juste de pouvoir joindre les deux bouts et ils demandent juste aux politicien·nes d’être assez courageux·euses pour les aider à obtenir ça.

Alexandria Ocasio-Cortez dans Cap sur le Congrès

Lors de la campagne électorale, son souhait, désormais exaucé, était de faire partie de ces politicien·nes capables de défendre les intérêts des États-Unien·nes. C’est son père, décédé quand elle était à la fac, qui l’a convaincue qu’elle avait un pouvoir à exercer en ce monde. Lors d’un road trip avec son paternel, celui-ci l’a amenée devant le Capitole, le lieu qui abrite la Chambre des représentant·es, et en pointant du doigt le bâtiment et ses alentours, il lui a déclaré :

Tu sais, tout ceci nous appartient. C’est notre gouvernement. C’est à nous. Donc tout ceci t’appartient.

Sergio Ocasio, père d’Alexandria Ocasio-Cortez cité par celle-ci dans Cap sur le Congrès
Capitole, Washington D.C. © Cap sur le Congrès

La dernière chose que lui a dit son père avant de mourir est qu’il voulait qu’elle le rende fier. « Et je pense avoir finalement réussi », dit Alexandria Ocasio-Cortez en riant à la fin du documentaire Cap sur le Congrès.

Aujourd’hui, Alexandria Ocasio-Cortez incarne le rêve américain. Elle est la plus jeune élue à la Chambre des représentant·es, et ce en partie grâce à l’aide précieuse des groupes populaires Justice Democrats et Brand New Congress.

AOC, Brand New Congress et Justice Democrats contre l’establishment et pour l’empowerment

Les groupes populaires, Justice Democrats et Brand New Congress, recrutent des candidat·es pour se présenter contre les politiciens enracinés dans le système, autrement dit ils luttent contre l’establishment, c’est-à-dire l’ordre établi parfois exempté de valeurs morales. Les groupes reçoivent plus de 10 000 candidatures spontanées. Alexandria Ocasio-Cortez a été nominée par son frère. Elle n’avait jamais envisagé la politique et pensé à présenter sa candidature avant. Justice Democrats et Brand New Congress ont élu avec un suffrage de 100% la candidature d’AOC du fait notamment de son altruisme et de sa force de détermination.

Brand New Congress et Justice Democrats ont l’objectif commun et majeur d’éradiquer la politique corrompue par l’argent. L’idée est de proposer une voie alternative pour accéder au Congrès, autre que la voie actuelle. Pour l’instant, on accède au Congrès grâce aux lobbies et groupes d’intérêt. Il y a actuellement 81% d’hommes au Congrès. La plupart d’entre eux sont blancs, millionnaires, avocats.

CORBIN TRENT – JUSTICE DEMOCRATS [CAP SUR LE CONGRÈS]

Le but est donc d’élire des personnes issues de la classe ouvrière pour que les personnes issues de cette même classe sociale puissent être justement représentées au Congrès. C’est ce que suppose l’idée d’empowerment ; celle-ci implique l’émancipation des individus par la prise de pouvoir et par l’initiative d’actions. Cela permettrait un effet boule de neige, qui changerait la manière dont on perçoit le gouvernement et la politique dans le pays que sont les États-Unis, afin de combler le fossé en matière de compréhension mutuelle et de communication au sein de la nation états-unienne.

I’m running because everyday Americans deserve to be represented by everyday Americans.

AOC à Washington, D.C. – colloque du Brand New Congress (2018) [Cap sur le Congrès]

Traduction : « Je me présente aux élections parce que les Américain·es de tous les jours mérite d’être représenté·es par des Américain·es de tous les jours ». Brand New Congress et Justice Democrats a su recruter un nouveau visage sur la scène politique que les politiciens établis n’ont pas vu venir et sur qui ils n’ont pas pu faire pression avec un emploi ou autre. Les groupes populaires ont choisi une personne qui représente sa communauté à bien des égards, une candidate figure de l’intersectionnalité, insurgée, près du peuple, une femme de couleur originaire du Bronx (elle y vit depuis trois générations), une latina, boricua (personne originaire de Porto Rico), descendante des Indiens Tainos, descendante des esclaves africains ; voilà tout un répertoire de qualifications qu’elle emploie pour se définir elle-même, pour affirmer son identité aux multiples facettes. Ainsi, Alexandria Ocasio-Cortez a été candidate pour le Bronx et le Queens en menant une campagne populaire d’arrache-pied.

On travaille plus parce qu’on est des femmes. On n’est pas des riches blancs en costard.

PAULA JEAN SWEARENGIN, CANDIDATE EN VIRGINIE-OCCIDENTALE À LA PRIMAIRE DES ÉLECTIONS DE MI-MANDAT DE 2018, en s’adressant à AOC [CAP SUR LE CONGRÈS]

Face à ces riches hommes blancs en costard, la volonté affirmée est de dessiner un nouveau paysage politique, de faire mieux que le pouvoir en place, et de construire une machine de financements populaires qui se démarquera des pouvoirs institutionnels établis et qui redonnera réellement le pouvoir au peuple pour qu’il le garde pour de bon. En effet, conformément à la Constitution, les élu·es ont ce devoir de représentations de la communauté et de défense des intérêts de cette même communauté : le collectif doit passer avant l’individualité de l’homme ou de la femme politique.

Il ne s’agit pas de m’élire moi au Congrès, il s’agit de NOUS élire au Congrès.

AOC dans Cap sur le Congrès
Constitution des États-Unis © House of Representatives

Joseph Crowley, l’adversaire démocrate millionnaire

En 2018, un nombre record de femmes, de personnes de couleur et des outsiders (des personnes à l’origine non professionnelles de la politique) entreprend de transformer le Congrès. De nombreux élus démocrates affrontent le défi des primaires lancé par d’autres démocrates qui candidatent pour la première fois.

À l’époque candidate dans la 14ème circonscription de New-York, lors du tournage du documentaire Cap sur le Congrès, elle précise avec humour : « Si j’étais une personne normale et rationnelle, j’aurais laissé tomber cette course depuis longtemps ». Ces paroles se justifient du fait des personnes contre qui elle s’oppose et qui sont prêtes à tout pour détruire les outsiders, ces novices en politique, parce qu’elles sont adeptes de la fameuse formule communément attribuée à Machiavel : « la fin justifie les moyens » – le machiavélisme désignant une conception de la politique qui prône la conquête et la conservation du pouvoir par tous les moyens.

Pour se présenter à la primaire des élections de mi-mandat, il faut minimum 1250 signatures, mais AOC stipule :

Parce qu’on affronte « le patron », on doit rassembler 10 000 signatures.

AOC dans Cap sur le Congrès

Surnommé « the boss », président du parti démocrate du Queens, chef de circonscription, quatrième démocrate le plus puissant du Congrès qui a nommé tous les juges fédéraux pendant ses mandats, Joseph Crowley n’avait pas eu d’adversaire aux primaires depuis 14 ans avant l’arrivée de Alexandria Ocasio-Cortez. Qu’est-ce qu’il faut savoir au sujet de Joseph Crowley ? Réponse issue du documentaire Cap sur le Congrès ci-dessous.

Tous ces points mentionnés ont permis à Alexandria Ocasio-Cortez d’installer progressivement ses idées et sa légitimité afin de gagner les primaires démocrates puis les élections face au républicain Anthony Pappas. Généralement, précise Alexandria Ocasio-Cortez dans le documentaire Cap sur le congrès, la personne remportant la primaire démocrate dans la 14ème circonscription de New-York gagne aussi les élections finales et donc le siège à la Chambre des représentant·es. C’est chose faite !

AOC élue à la Chambre des représentant·es, en bref

Blason de la Chambre des représentant·es

2018, États-Unis, d’après Le Monde, les femmes n’ont jamais été aussi nombreuses à se présenter aux élections de mi-mandat. Elles ont représenté 28% des candidat·es. Alexandria Ocasio-Cortez était l’une d’entre elles. Elle est désormais la plus jeune membre du Congrès américain. Rappelons rapidement le fonctionnement du Congrès, des élections de mi-mandat et les enjeux qui se jouent à la Chambre des représentant·es.

La Chambre des représentant·es est l’une des deux chambres du Congrès américain, la deuxième étant le Sénat, et elle est une partie de la branche législative du gouvernement fédéral. Conformément à la Constitution, la Chambre des représentant·es des États-Unis est chargée de légiférer et voter les lois fédérales. Le nombre d’élu·es à la Chambre est fixé par la loi à pas plus de 435, représentant proportionnellement la population de 50 états. Ainsi, face à plus de 400 personnes, il est nécessaire de mettre en pratique des compétences en termes d’expression orale pour faire entendre sa voix.

La Chambre des représentant·es © House of Representatives

L’éloquence d’AOC en 10 points et quelques notions

La rhétorique en théorie […]

Voici 5 notions clefs permettant un rapide tour d’horizon de l’art de la rhétorique.

[…] et en pratique

La question à laquelle les 10 points relevés ci-dessous vont tenter de répondre est la suivante : Comment Alexandria Ocasio-Cortez s’exprime dans l’arène politique ? 

L’engagement, AOC, Greta Thunberg & Megan Rapinoe

Pour faire de la politique, il est nécessaire de bien s’entourer afin de mettre en œuvre une forme de transfert de légitimité. Au vu des personnes ci-après, AOC sait choisir ses allié·es, tout autant que ses adversaires par ailleurs.

Greta Thunberg, figure du jeune militantisme écologiste

Alexandria Ocasio-Cortez est en accord avec les revendications de Greta Thunberg. Pour elles, la solution à la crise écologique dans laquelle nous sommes réside dans l’action par le collectif, en créant une communauté mondiale sensible et consciente. Tout comme Greta Thunberg, AOC propose des décisions concrètes :

Pour résoudre la crise climatique, j’encourage tous les dirigeant·es de la planète à changer leur point de vue et à mettre la pression sur les grandes entreprises productrices d’énergie fossile et d’émissions de gaz à effet de serre.

Interview d’AOC pour Brut [16/10/2019], au C40 Cities World Mayors Summit 2019, à Copenhague (Danemark)

Alexandria Ocasio-Cortez s’entoure donc de figures de proue et ce dans des domaines divers et variés.

Megan Rapinoe, championne du monde 2019, icône lesbienne et féministe

Alors qu’en tant que capitaine de l’équipe de football des États-Unis, Megan Rapinoe avait annoncé son refus, en cas de victoire, de se rendre à la Maison blanche pour rencontrer son tristement célèbre locataire, elle accepte sans réfléchir à deux fois l’invitation d’Alexandria Ocasio-Cortez à la Chambre des représentant·es.

Il s’est avéré qu’en plus d’être liées par un même principe, celui de l’engagement, Megan Rapinoe, Greta Thunberg et Alexandria Ocasio-Cortez ont un ennemi commun : l’occupant du Bureau oval, qu’on ne présente plus.

AOC face à l’adversité

Donald Trump, Président des États-Unis

Trump débite son verbiage sur Twitter, comme à son habitude, et il prend fréquemment pour cible l’élue latino-américaine Ocasio-Cortez…

Alexandria Ocasio-Cortez ne se prive pas de lui répondre par apparition télévisée ou directement sur les réseaux sociaux :

Afin de faire écho à la question d’AOC dans son post Instagram (« Ils ne savent vraiment pas quelle circonscription je répresente, si ? »), voici la zone du 14ème district new-yorkais dont elle est en charge :

On reste dans l’atmosphère des réseaux sociaux avec un second interlocuteur d’AOC qui n’est autre qu’un chef d’entreprise à envergure mondiale.

Mark Zuckerberg, PDF de Facebook, cité à comparaître à la Chambre des représentant·es

En octobre 2019, celui-ci est interrogé par Alexandria Ocasio-Cortez au sujet des publicités politiques ciblées (qui ont notamment fait ravage lors des élections présidentielles 2016) au cours de son audition sous serment au Congrès états-unien.

BFM TV | Mark Zuckerberg bousculé par Alexandria Ocasio-Cortez [23/10/2019]

Ses multiples prises de parole et son engagement ont amené Alexandria Ocasio-Cortez dans un processus de starification qui a fait d’elle une politicienne reconnue fiable et digne de confiance à l’échelle internationale.

La réappropriation de l’image d’AOC, signe de notoriété politique internationale

Sa renommée est désormais confortablement installée. La preuve en images.

Italie | AOC dans la campagne choc de AleXsandro Palombo

Pour son œuvre visible dans les rues de Milan, un artiste italien, AleXsandro Palombo, aussi connu pour sa campagne concernant la journée internationale de lutte contre le cancer (voir ci-après), l’a même choisi parce qu’elle est l’une des figures politiques les plus importantes de notre monde contemporain. L’objectif de son art social ? Sensibiliser, faire prendre conscience, faire réagir, encourager à briser le silence, lutter contre les violences faites aux femmes en impliquant des personnes engagées, qui peuvent user de leur pouvoir pour changer un système de discriminations systémiques et qui peuvent militer pour l’égalité des genres. A l’instar d’Alexandria Ocasio-Cortez.

France | La campagne « Écoutez le monde changer » d’Europe 1

Le 29 octobre 2019, Europe 1 lance une campagne d’affichage en collaboration avec l’agence Romance. Europe 1 qualifie cette campagne de « nouvelle signature » afin d’affirmer la singularité de la radio qui marque les esprits en décryptant les transformations de la planète et de la société. On peut y voir Greta Thunberg, Boris Johnson, Emmanuel Macron, Angela Merkel, Donald Trump, Bilal Hassani ou encore des images en lien avec la crise écologique que nous traversons.

ÉCOUTEZ LE MONDE CHANGER © Europe 1

Le 3 février 2020, Europe 1 lance le deuxième opus de la campagne Écoutez le monde changer. En son sein et au côté de Meghan Markle, du Prince Harry et de l’alarmant incendie en Australie, se trouve Alexandria Ocasio-Cortez.

Visuel diffusé à partir du 3 février 2020

De cette manière, Alexandria Ocasio-Cortez s’impose comme une figure majeure participant aux changements qui touchent le monde politique. Ces reprises des représentations de la politicienne développent son image de marque et ainsi son ethos, qui pourraient peut-être l’amener jusqu’à la Maison blanche ?

N.B. : Alexandria Ocasio-Cortez, née le 13 octobre 1989, a aujourd’hui 30 ans, et pour candidater à la Présidence des États-Unis, il faut avoir minimum 35 ans. Encore quelques années à attendre donc…


Aurélie Lopez

Groupes militants

Portraits de jeunes militantes : des Greta avant Greta ?

Depuis plus d’un an, de nombreuses figures militantes écologistes sont apparues dans la sphère médiatique. Qui sont-elles ? Des Greta Thunberg en devenir ? C’est ce que semble vouloir présenter l’algorithme de Google et les médias, qui d’après nos recherches, voient dans ces figures militantes de nouvelles Greta Thunberg polonaise, pakistanaise, américaine, ou encore thaïlandaise. Qui sont-elles réellement ? Quels sont leurs combats ? Voici les quelques portraits de ces jeunes femmes du monde engagées contre la destruction humaine et pour la protection de la planète : des Greta avant Greta.

1) Severn Cullis-Suzuki

Severn Cullis-Suzuki prononce son discours devant l’assemblée du Sommet de la Terre à Rio en 1992. / Libération.fr.

Née au Canada en 1979, Severn Cullis-Suzuki est surtout connue pour son discours prononcé lors du Sommet de la Terre qui s’était tenu à Rio de Janeiro en 1992. Un discours et une vidéo célèbres et ovationnés par l’assemblée puis par le public dont certaines phrases devenues symboliques comme « Ce que vous faites me fait pleurer la nuit. » nous rappelle aujourd’hui celles de Greta Thunberg. Peut être était-ce là le premier « How dare you ? » de l’histoire ?

« À l’école, même au jardin d’enfants, vous nous apprenez à nous comporter, à ne pas nous battre, à respecter les autres, à nettoyer ce que nous avons dérangé, à ne pas blesser d’autres créatures, à partager sans avarice. Alors, pourquoi faites-vous les choses que vous nous dites de ne pas faire ? Je vous mets au défi, s’il vous plaît, faites que vos actions reflètent vos mots. »

Ainsi et alors qu’elle n’a que 12 ans, Severn Cullis-Suzuki devient la première jeune militante écologiste bien avant la jeune suédoise. Aujourd’hui devenue mère et âgée de 41 ans, la canadienne n’abandonne pas ses promesses et continue sont combat notamment à travers la création et la réalisation d’un programme télévisuel pour enfant nommé Suzuki’s Nature Quest diffusé au Canada, mais également à travers les conférences qu’elle présente dans le monde.

2) Luisa-Marie Neubauer

La jeune activiste allemande prononce un discours lors de la marche pour le climat organisée le 5 mars 2019. / Ze.tt

Ambassadrice de ONE, une organisation non gouvernementale qui lutte contre la pauvreté et les maladies évitables en Afrique, Luisa Neubauer est aussi connue comme étant une figure écologiste célèbre en Allemagne et dans le monde. La jeune femme est surtout connue dans les médias pour sa parole vive et franche. Une arme qu’elle n’hésite pas à utiliser contre les dirigeants de l’Allemagne qui se refusent encore à la fermeture des centrales de charbon et qu’elle accuse de ne pas respecter les Accords de Paris signés à New York en 2016 : « Si l’humanité veut limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré, nous n’avons qu’un budget d’émission global de 380 gigatonnes de CO2. Si nous continuons comme ça, nous aurons utilisé ce budget en Allemagne dans neuf ans et demi. Malgré tout, M. Altmaier a l’intention de permettre aux centrales au charbon de fonctionner jusqu’en 2038. Cela n’est pas conforme à l’Accord de Paris ». Née en 1996, cette activiste de 23 ans n’en finit pas de s’engager dans des combats et des actions pour la protection de l’environnement et par conséquent, pour celle des générations futures.

Beaucoup de gens plus âgés, en particulier ceux aux positions de pouvoir, se sont installés dans la crise climatique. Cette crise est aussi un conflit de génération.

Lemonde.fr

3) Vanessa Nakate

Cette jeune ougandaise, engagée depuis 2018 dans la lutte contre le changement climatique et aussi la créatrice et fondatrice du mouvement Rise Up et de l’organisation Youth For Future Africa. Ses actions, portées par sa volonté de donner un avenir aux jeunes générations africaines, œuvrent pour la protection de la faune et de la flore africaine mais également dans le but de donner un accès à l’eau potable à toute la population. Principalement engagée dans la protection de la forêt tropicale du Congo, Vanessa Nakate est aujourd’hui célèbre sur les réseaux sociaux, devenus son seul tremplin pour son message. Mais dernièrement, elle fût aussi la victime de la censure du monde médiatique. En effet, étant pourtant présente lors du Forum de Davos ce 24 janvier 2020, son visage fût coupé et enlevé du cadre d’une photo officielle montrant des jeunes militantes blanches dont Greta Thunberg. Seule jeune ougandaise et africaine, Vanessa Nakate ne s’est pas laissée faire et a déclaré : « L’Afrique est le dernier émetteur de gaz à effet de serre. Mais nous sommes les plus touchés par la crise climatique. Que vous effaciez nos voix ne changera rien. Que vous effaciez notre histoire ne changera rien. Est-ce que ça veut dire que je n’ai pas de valeur en tant qu’activiste africaine ? Ou que les Africains n’ont pas du tout de valeur ? » ; suivi de près par un message à l’agence de presse dépositaire de la photo : « Mon message pour AP est que les activistes africains et les personnes de couleur ont besoin d’être respectés. Mais c’est valable pour tous les médias qui font ça, car personne ne s’élève contre ce genre de pratique. » d’après l’article du journal Le Monde.

4) Marie-Claire Graf

Jeune activiste, engagée pour le climat, Marie-Claire Graf est une figure reconnue en Suisse pour ses actions militantes. / News.un.org

Cette jeune femme, originaire de Suisse, est devenue dernièrement une figure centrale dans son pays, en Europe et dans le monde de par sa participation au Sommet des Nations Unies de New York le 21 septembre dernier. Pour cause, l’organisation avait invité près de 500 jeunes militant.es représentant chacun.e leur pays, leur nation et leur génération. Marie-Claire Graf était donc présente pour représenter la parole de la jeune génération suisse lors de cette Assemblée. « Pour moi, le message le plus urgent est de rappeler que nous faisons face à une catastrophe, une crise climatique. Nous allons donc accélérer les actions de mobilisation, très rapidement » explique-t-elle aux journalistes de l’ONU Info. Plus centralement en Suisse et depuis trois ans, ses actions sont construites de par l’importance qu’elle accorde à l’éducation des générations futures sur des sujets vitaux comme celui de la protection de l’environnement. Elle est aussi l’initiatrice du mouvement Friday For Future en Suisse, qu’elle nommera plutôt « Grève de l’école pour le climat ».

Nous ne pouvons pas continuer à faire passer le profit économique avant la santé de la planète et des gens. Il faut un changement substantiel de système et de mentalité. Un tournant radical ? Peut-être. Mais la destruction de la planète est aussi une chose radicale.

Swissinfo.ch

5) Malala Yousafzai

Malala Yousafzai avec sa médaille du Prix Nobel de la paix en 2014. / Philadelphia Inquirer.com

Avant celle de l’adolescente suédoise Greta Thunberg, la figure de Malala Yousafzai est sûrement la plus célèbre et la plus symbolique du combat des jeunes générations. Pour cause, cette jeune femme pakistanaise de 22 ans fût la première femme de son pays à remporter le Prix Nobel de la paix en octobre 2014 alors qu’elle n’est âgée seulement de 17 ans. Née à Mingora en 1997, Malala Yousafzai milite pour les droits des femmes et s’oppose à l’esclavagiste des talibans qui interdisent l’accès à l’éducation aux filles et ce, dès son plus jeune âge. Elle écrit pour la BBC à 12 ans et crée sa fondation éponyme à 15 ans pour reconstruire les écoles détruites par la guerre. Après une tentative d’assassinat le 9 octobre 2012, la jeune femme blessée est conduite en Angleterre où elle y est soignée et protégée. Cette acte des talibans lui construit un nom et transforme son visage en un symbole militant fort et courageux d’une manière internationale mais surtout à travers les réseaux sociaux. Aujourd’hui étudiante à l’université d’Oxford, Malala est considérée comme une véritable icône du mouvement pour la paix et pour les droits des femmes dans le monde. Elle continue également son combat contre la fabrication des armes chimiques au côté de l’institution internationale de l’Organisation pour l’interdiction des Armes Chimiques (OIAC) créée en 1997. Une année devenue elle aussi, symbolique.

6) Nojoud Ali

Alors âgée de 10 ans, Nojoud Ali milite contre le mariage forcé dans son pays. / Le Point.fr

Dans les pas de Malala Yousafzai pour les droits des femmes, nous retrouvons ceux de la jeune yéménite Nojoud Ali qui lutte et milite contre le mariage forcé. En effet, alors qu’elle vient de fêter ses 10 ans, la jeune fille est mariée de force par sa famille à un homme qu’elle ne connaît pas et décide de demander le divorce. Aidée de son avocate, Chadha Nasser, elle-même figure féministe et militante pour les droits des femmes, Nojoud réussit à obtenir son divorce et à devenir une figure et un symbole yéménite. Elle s’oppose radicalement aux traditions tribales de son pays, une société archaïque et patriarcale qui autorise le mariage forcé des jeunes filles à partir de 15 ans (Nojoud n’en avait que 10). En 2008, Nojoud Ali décide d’écrire, soutenue par la journaliste Delphine Inoui. En résulte un roman autobiographique de 188 pages dans lesquelles elle décrit son combat. Publié en 2009, ce livre est devenu aujourd’hui une preuve iconique de son courage qu’elle conserve et partage encore à 22 ans en tant que femme et étudiante en droit.

Quand je serai grande, je veux défendre les gens opprimés. Comme Chadha !

Le Figaro.fr

8) Emma Gonzalez

Emma Gonzalez rend hommage aux lycéen.nes de Parkland tué.es lors de la fusillade du 14 février 2018. / Information.tv5monde.com

Célèbre aux États-Unis pour son engagement contre la production et l’utilisation légale des armes à feu, Emma Gonzalez est connue comme étant une figure militante mais surtout comme une rescapée. En effet, la lycéenne réussit à sortir vivante de son établissement lors de la fusillade du 14 février 2018 dans son lycée de Parkland. Un mois après la tragédie, elle rend hommage à ses ami.es disparu.es à la tribune de Washington dans un discours percutant décrivant le massacre de la tuerie. Cette jeune américaine de 21 ans, devenue maintenant icône, avait déjà tenté d’interpeller la Maison blanche trois jours après l’attentat qui a tué 17 lycéen.nes : « Si le président me dit en face que c’est une terrible tragédie et qu’on ne peut rien y faire, je lui demanderai combien il a touché de la National Riffle Association (NRA). Moi, je le sais : 30 millions de dollars. (…) À tous les hommes politiques ayant reçu des dons de la NRA, honte à vous ! » d’après le journal TV5 Monde. Aujourd’hui, Emma Gonzalez et ses camarades ont créé un mouvement solidaire, March for our lives, dans le but de demander une plus grande régularisation des armes à feu. D’origine cubaine, la jeune militante n’en est pas à son premier combat puisqu’elle revendique également et ouvertement sa bisexualité dans une société qui peine à ouvrir son regard sur les différences. « J’ai 18 ans, je suis cubaine et bisexuelle. » marque le début de son discours à Washington comme celui de son statut de porte-parole.

Les portes-paroles des jeunes générations ne manquent pas dans le monde, et ils et elles ne s’appellent pas Greta Thunberg. Voici leur message :


Lina Godet