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Toulouse Innovation

Smart City & Toulouse Métropole – Quel avenir pour une ville start-up ?

Depuis 2015, la métropole de Toulouse déploie une « Stratégie Smart City ». Sous la tutelle du maire Jean-Luc Moudenc, de nombreux projets sortent de terre. Leurs objectifs s’inscrivent dans le développement d’une métropole ouverte vers le monde moderne. Une alliance se créée entre le monde des start-up et celui de l’urbanisme (moderne) mais quelles peuvent en être les conséquences ?

Toulouse est actuellement en période d’élections municipales. Jean-Luc Moudenc, le maire actuel est aujourd’hui en campagne. De ce fait, et jusqu’au 22 mars, Toulouse Métropole ne peut communiquer sur ses actions passées. Ainsi, communiqués de presse et déclarations de la mairie ont été rendus inaccessibles.

Publication Facebook du 4/12/19

Toulouse Métropole, la ville de demain 

En cherchant sur la toile, certains documents officiels sont encore trouvables, comme ce communiqué de Toulouse Open Métropole, trouvé sur le site de la ville de Gagnac-sur-Garonne.

L’article n’est pas daté et contient seulement des visuels (ci-dessous), ainsi qu’un court texte expliquant le déploiement de la « métropole idéale du futur ». Ce document officiel explique que : « Grâce aux nouvelles technologies, la ville pourra proposer de nouvelles innovations de technologie et de services en termes de déplacements ou de communication, comme la 4G dans le métro, la mise en place d’un mobilier urbain connecté ou encore la mise en place d’un véhicule autonome dans Toulouse. Mais ces nouveautés seront aussi d’ordre social, avec par exemple la création de quartiers intergénérationnels. »

Dans ce communiqué, les acteurs du projet définissent le terme de Smart City (définition du CNIL) pour ensuite légitimer le projet « Open Métropole ». Il est décrit comme un projet d’innovations urbaines et technologiques dédié à améliorer le « quotidien » des toulousain·e·s.

Ce visuel présente les différents objectifs du projet Toulouse Open Métropole. Sa cible semble être le·la citoyen·ne toulousain·e (actif·ve, jeune famille, étudiant·e). L’information est présentée de manière esthétique, claire et simplifiée, voire vulgarisée. L’usage des pictogrammes révèle une volonté d’inscrire le projet dans la modernité, en s’appuyant sur les codes du numérique, des réseaux sociaux numériques et des start-ups (définit par le Larousse comme une « Jeune entreprise innovante, notamment dans le secteur des nouvelles technologies.« 

Portrait de Bertrand Serp

Compte Twitter

En campagne municipale :

Diapositives de présentation du projet Toulouse Open Métropole

L’Open Métropole : le développement d’une « ville intelligente »


Une open métropole ou les données circulent librement et apportent des solutions techniques dans les domaines de : l’énergie, la mobilité, l’e-citoyenneté et le service à la personne.

Smart City : Toulouse l'Open Métropole

Lancée en 2014, la démarche Smartcity, qui vise à construire la métropole de demain, vient de fêter ses un an. L'occasion de faire un bilan d'étape et de s'intéresser à tous les projets en cours ou à venir, dans le cadre du nouveau schéma directeur adopté par la Métropole

Publiée par Toulouse Métropole sur Vendredi 11 décembre 2015

Cette vidéo a été publiée le 11 décembre 2015 sur le réseau social numérique Facebook et sur la page officielle de Toulouse Métropole. Elle parait être une présentation du projet Toulouse Open Métropole (englobée dans le projet Smart City). Elle est, avant tout, un outil de communication qui permet aux acteurs du projet d’informer les citoyen.ne.s.

Jean Luc Maté, président de l’association Cluster Automotech, prend la parole pour citer une des améliorations au niveau de la mobilité. Par exemple, lorsque le citoyen cherche une place de parking ou circule dans la ville, des capteurs situés dans la chaussée lui préviendront des zones d’embouteillage.

Bertrand Serp cite ensuite un autre exemple : les capteurs dans les poubelles. Ils permettront de savoir si l’état actuel des poubelles dans nos villes, et ainsi de « mieux rationaliser nos tournées, faire des économies, d’être smart et plus intelligent dans nos process ».

La communication lancée par Toulouse Métropole est centrée sur l’aspect innovant et moderne d’une ville intelligente. Elle met notamment en en avant toutes les améliorations quotidiennes qu’elle suscitera. Ce projet apparait ainsi comme moderne et devrait rendre plus facile le quotidien des toulousain·e·s.

Comment ne pas être séduit à l’égard d’une telle communication ? Mais cette vidéo n’aborde pas les dispositifs techniques, numériques et de surveillances qui sont (et vont être) mis en place pour dans le cadre du projet Smart City.

Toulouse est ainsi décrite comme « un territoire d’innovation », une niche à start-ups, par la pluralité des acteurs enrôlés dans ce projet d’envergure : 350 citoyens, start-ups, PME, TPE, glosters et grandes entreprises, ainsi que des partenaires institutionnels. Ce projet dispose également d’un budget d’envergure : « Sur les 5 prochaines années, un tiers du budget consacré au développement économique par Toulouse métropole va bénéficier aux acteurs de la Smart City, à raison de 100 millions d’euros par an. »

Capteurs, caméras, hauts parleurs, IBM… sont autant de dispositifs qui sont aujourd’hui déployés dans la ville. Est-ce qu’il s’agit réellement d’une solution pour améliorer notre quotidien et aller à l’encontre de l’insécurité ? Ou s’agit-il d’un moyen de contrôler les citoyen.ne.s tout en marchandant leurs données ?

Retour sur l’événement « Toulouse 2030 », tenu du 12 au 14 octobre 2019 – Place du Capitole

Ce rendez-vous est l’occasion pour les acteurs privés et publics de l’aménagement et du développement urbain de la ville rose d’informer le public sur les projets et chantiers en cours sur le territoire. Il est décrit comme étant un évènement :

  • Exceptionnel : de par sa position géographique, la place du Capitole, un élément central de la ville. Ce choix spatial peut ainsi révéler les ambitions du projet.
  • Pop-up : « 3 jours de fêtes », dont l’objectif est d’être le « plus percutant possible et de proposer un grand week-end de fêtes autour de la ville de demain ».
  • Savant et populaire : de par son contenu défini comme riche (scénographie, programmation éclectique, invités de renoms).
  • Fédérateur : le « Tous ensemble » (institutions locales, grands projets urbains, aménageurs, promoteurs, architectes, urbanistes, paysagistes, partenaires…) qui permettra de « donner la parole à chacun d’entre eux et d’offrir une véritable visibilité aux travaux qu’ils défendent ».

Nous pouvons remarquer que la diversité du programme et des activités proposées rendent le contenu ouvert à tou.te.s. La cible d’un tel événement est grand public (intergénérationnelle et diversifiée). Nous remarquons une volonté d’informer le public selon 2 niveaux de lecture : un contenu savant, destiné au public averti ; et un contenu informationnel davantage vulgarisé, destiné à un public plus large.

Un des objectifs d’un événement de cette envergure semble également se situer dans la création d’une communauté. Cette dernière se lierait via les valeurs communiquées par Toulouse Métropole. Dans un tel contexte, la modernité, l’innovation et la technique serviraient de maillon fédérateur au développement d’une communauté, que l’on pourrait qualifier « d’intelligente » à l’aube de la « Smart City de demain ».

Les moyens mis en œuvre pour cet événement paraissent être importants (budget conséquent et invités de marques), le but principal étant sûrement de faire entendre et accepter le projet Toulouse Métropole auprès de l’opinion publique. La stratégie de communication, quant à elle, est centrée sur la séduction, c’est-à-dire que la forme et le fond ont été pensé pour séduire le public, les spectateur·trice·s, et les faire adhérer aux valeurs transmises.

La bataille entre Toulouse 2030 et Toulouse 2031

Toulouse 2031 est un collectif regroupant 29 associations. Cette alliance prône la volonté d’aller à l’encontre des projets développés par Toulouse 2030. Leurs objectifs est ainsi de placer le citoyen.ne au cœur du développement de sa ville. Pour faire « face à Toulouse 2030, le lobby des multinationales (immobilier, eau, banques), Toulouse 2031 s’efforce de proposer un futur pour tous les Toulousain·e·s ».

Les 15 et 16 juin 2019, les associations, les bénévoles, les collectifs et les organisateurs (le DAL31, Non à Val Tolosa, St Cyp’ quartier libre, Non au gratte-ciel de Toulouse ou encore l’Université populaire de Toulouse) se sont réunis sur les quais de la Daurade.

Né en réaction à l’événement Toulouse 2030, Toulouse 2031 lutte « contre la privatisation de l’aéroport, pour l’accès au logement, contre le projet de tour Occitanie, pour une gestion publique de l’eau… ». Une bataille est lancée, la ville rose (ou la prochaine start-up city) devient source de convoitises, où banquiers, promoteurs, institutions, associations et citoyens s’affrontent.

Mais, face au pouvoir de leurs adversaires, la parole de ces associations peut-elle suffire à retarder un projet d’une telle envergure ?

Toulouse 2031 is coming!

ALLOCUTION EXCEPTIONNELLE DE JVC:" Good news: dans le cadre de notre partenariat avec nos amis de la @Compagnie De Phalsbourg, nous avons signé le permis de construire de la Tour d'Occitanie! Un grand pas pour le tourisme d'affaire dans notre ville!Un immense merci aux lobbys de l'immobilier et du BTP pour nous avoir aidé à bétonner l'Enquête Publique, ça c'est du team-building!"??

Publiée par Toulouse 2031 sur Dimanche 26 mai 2019

Retour sur l’événement Smart City Toulouse, tenu le 13 décembre 2019 – Place du Capitole

Cet événement à été organisé par Toulouse Métropole, La Tribune et Live Living City.

La présentation est ouverte par Jean-Luc Moudenc, suivi par Cédric O, secrétaire d’État au Numérique. Au cours de la journée, différents thèmes ont été abordés : 

  • Les nouveaux enjeux de l’intelligence artificielle (IA)
  • L’innovation sociale, ou les nouvelles armes données par la Smart City pour lutter contre toutes les formes d’exclusion sociale, au bénéfice de la qualité de vie
  • La nature en ville, face à l’urgence climatique
  • Les nouvelles perspectives données par la gestion de l’espace et des mobilités (à travers la Smart City)

Par ces 4 thèmes, les acteurs privés et publics présentent les grands objectifs du plan Smart City : le développement d’une ville intelligente basée sur l’innovation sociale et numérique. Ces progrès semblent représentés des solutions aux problèmes sociaux, environnementaux et économiques de Toulouse, et plus largement aux problèmes mondiaux. 

Les invités viennent de toutes disciplines (économie, géographie, marketing, numérique) ou domaines (entrepreneurial, innovation, éducation, environnemental) et sont principalement chercheurs ou chefs d’entreprises. 

Ce rendez-vous est, ainsi, transdisciplinaire et allie le fonctionnement d’une ville à celui du monde de l’entreprise. Est-ce qu’une ville peut réellement fonctionner comme une entreprise ? Le développement du numérique et des start-ups ne serait-il pas sur le point d’englober nos sociétés modernes ? 

Pour les intervenant·e·s, la solution se situerait au cœur de la transparence, en donnant de l’éthique aux machines de demain. Est-ce qu’une morale appliquée aux technologies suffirait à nous sauver des effets néfastes d’un monde basé sur l’économie ? 

Pierrick Merlet, journaliste à la Tribune, revient sur ces questions qui animent nos sociétés à l’aube de l’intelligence artificielle : « Faut-il avoir peur de l’intelligence artificielle et des technologies qui l’utilisent […] ou encore l’exploitation des données que cette intelligence récolte sur ses utilisateurs, sans parler des robots intelligents qui pourraient remplacer les hommes ? »

Sur le terrain, pour faire exister cette transparence, la solution proposée est l’instauration d’un cadre politique. Un ensemble de règles (accords) créant une charte d’obligations éthiques. 

Pour Bertrand Sep, « Les politiques sont au cœur du système car c’est à eux de fixer les règles. Alors aujourd’hui, il est dit que la France est trop normée mais grâce à ces gardes-fous nous savons où nous allons. » Fixer des limites aux progrès tout en garantissant son développement… pour les élus, la solution se trouverait donc dans l’équilibre.

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Toulouse Sécurité

Toulouse « ville intelligente » : protection ou surveillance à l’ère du digital ?

En 2014, le maire de la Ville rose, Jean-Luc Moudenc, a lancé un vaste plan de protection citoyenne, avec l’idée d’installer pas moins de 400 caméras, ainsi que des dispositifs de surveillance à la pointe de la technologie dans toute la ville. Or, l’idée d’une ville à l’allure de 1984 de George Orwell est loin de faire l’unanimité.

À l’image des initiatives lancées aux 4 coins du globe depuis une dizaine d’années, Toulouse Métropole a lancé en 2015 son projet de « Smart City », avec pour objectif de créer une ville plus innovante, plus connectée mais aussi et surtout, plus sûre. Toulouse a ainsi discrètement vu fleurir des dispositifs filmiques de plus en plus intelligents, certains faisant même appel à l’intelligence artificielle, au machine learning et à de meilleurs systèmes de gestion des vidéos. De son côté, le maire de la ville et membre des Républicains, Jean-Luc Moudenc, explique aux citoyen·ne·s vouloir assurer la sécurité de chacun·e. En outre, les progrès technologiques sont, doucement mais sûrement, en train de révolutionner la façon dont la police recueille des preuves et lutte contre la criminalité.

Par ailleurs, à cause des nombreuses attaques terroristes perpétrées sur le territoire français depuis 2015, le gouvernement a dû redoubler de moyens pour assurer la protection et la sécurité de ses citoyen·ne·s. L’état d’urgence est déclaré et la sécurité nationale devient le maître mot et la priorité du pays tout entier. C’est aussi dans ce contexte que Jean-Luc Moudenc s’est lancé, dès 2015, dans un vaste projet d’implantation de caméras de vidéosurveillance un peu partout dans la Ville rose. Par conséquent, à Toulouse, où l’on ne comptait que 21 caméras en 2014, on en dénombrait déjà 350 en 2016 et 402 en 2020, soit une hausse de… 1 814 % !

La répartition des caméras de vidéosurveillance dans le centre-ville de Toulouse.
En rouge sont représentées les caméras publiques, en bleu les caméras privées.
© toulouse.sous-surveillance.net

D’après les acteurs politiques favorables à l’installation de ces nouveaux dispositifs de surveillance, le recueil, l’analyse et le traitement des données personnelles serviraient à l’intérêt commun. Pourtant, il persiste, chez certain·e·s, une crainte légitime qu’une part de leurs données ne soient utilisées sans leur consentement, ou qu’une fois leur accord donné, ces dernières ne soient détournées. De fait, l’utilisation du machine learning dans le domaine de la sécurité est loin de faire l’unanimité : risque de reproduire des biais humains, fichage des citoyens… Le projet pose également problème sur le plan de la liberté d’expression, d’opinion, de conscience, de circulation, de manifestation, dans un contexte où la surveillance des foules est mise en exergue.

Dans ce contexte, l’enjeu des acteurs publics œuvrant à ce projet est de taille : obtenir, mais surtout conserver la confiance des citoyen.ne.s pour l’utilisation de leurs données pour l’intérêt général.

Vidéoprotection ou vidéosurveillance ? Le conflit entre protection citoyenne et protection de la vie privée

Il semble intéressant de souligner que, d’un point de vue sémantique, les termes repris par les différents acteurs municipaux sont différents : si la Droite préfère généralement parler de systèmes de « vidéoprotection », la Gauche et ses opposants parlent plutôt de « vidéosurveillance ». Il s’opère donc déjà un conflit autour de l’utilisation généralisée de ces dispositifs. D’ailleurs, l’un des arguments de l’opposition est d’affirmer que les caméras de surveillance n’auraient pas nécessairement une grande efficacité sur le taux de délinquance de la ville. En effet, les débordements et dégradations du centre-ville, au cours des manifestations qui ont lieu chaque semaine, suffisent à faire douter du pouvoir dissuasif de ces dernières.

En 2019, Toulouse prenait la neuvième place dans le classement des villes de plus de 100 000 habitants ayant le plus grand nombre de dispositifs de surveillance. Le maire de Toulouse, en pleine campagne pour les élections municipales de 2020, a par ailleurs confirmé sur son compte Twitter la volonté d’en installer 100 de plus d’ici la fin de son mandat, toujours dans le but de « protéger les toulousains » comme il le répète à plusieurs reprises (vidéo ci-dessous).


En outre, la mairie de Toulouse argumente en mettant l’accent sur la capacité des outils de vidéo-protection à contribuer à la résolution d’enquêtes et sur son utilité pour les victimes. Depuis 2016, le poste de contrôle vidéo a saisi la police 2 257 fois après avoir repéré un comportement suspect sur la voie publique. En 2017, le Capitole affirmait que les réquisitions d’images vidéo dans le cadre d’enquêtes de police sont passées de 73 à 385 depuis le début de l’implantation du réseau. En 2018, la police nationale a procédé à 1 418 réquisitions d’images auprès du Centre municipal de vidéoprotection urbaine (CVU), soit presque 2 fois plus qu’en 2017. La mairie insiste également sur un autre service rendu par la vidéoprotection : le secours à la personne, soit près de 207 cas en 2018.

Remise en cause de la protection citoyenne : des dispositifs liberticides ?

De leur côté, les personnes qui sont contre ces dispositifs avancent notamment 2 arguments.

Premièrement, de nombreuses études auraient démontré que ces dispositifs n’auraient pas d’effets avérés sur le taux de criminalité ou de délinquance.
En effet, selon le sociologue et chercheur Laurent Mucchielli, pour mesurer l’impact de la vidéosurveillance sur le taux de délinquance, il faudrait savoir, parmi ces réquisitions d’images, combien ont vraiment joué un rôle dans l’interpellation d’un individu. Toujours selon ses recherches, ils représentent 1 à 3 % des cas étudiés par le sociologue, un chiffre qui est loin de justifier les investissements réalisés par les communes de Toulouse Métropole : 9,7 millions d’euros depuis 2014 à Toulouse, où près de 400 caméras sont actuellement opérationnelles. Quant à la détection de faits de délinquance en direct, là encore d’après le chercheur niçois, le constat est sans appel :

« Elle est si faible qu’aujourd’hui, le système est détourné pour faire de la vidéo-verbalisation d’infractions routières. Et quand il s’agit de sécuriser une zone précise, comme un point de trafic de stupéfiants, les caméras ne font que déplacer le problème. »

Pour les instances gouvernantes, il s’agit d’offrir une plus grande protection aux citoyen·ne·s, une ville plus sûre. Mais faut-il pour autant renoncer à l’anonymat ? De tels systèmes supposent de se nourrir de toujours plus de données, et plus spécifiquement de données personnelles.

Aujourd’hui, le système est détourné pour faire de la vidéo-verbalisation d’infractions routières.

D’après Jean-François Mignard, de la Ligue des Droits de l’Homme Midi-Pyrénées, la surveillance est un engrenage. Ce dernier pointe du doigt les nouveaux dispositifs qui ont fleuri après les caméras de surveillance : caméra haut-parleur à la Daurade, applications pour dénoncer les incivilités de ses voisins, numéro vert contre les voiries encombrées, les incivilités et les questions de propreté, algorithmes de détection par IBM, caméras thermiques au bord de la Garonne… Dans un article de la Dépêche parût en 2018, il s’exprime : « On rentre dans l’ère de Big Brother. C’est une dérive au détriment des libertés publiques. »

Installées en 2017, les caméras haut-parleur de la Daurade permettent à l’agent qui voit l’infraction depuis le poste de contrôle vidéo, de s’adresser au contrevenant via le haut-parleur qui a été ajouté à la caméra déjà existante. Pour avoir personnellement rencontré la situation une fois avec des amis, j’avoue être restée sans voix face au rappel à l’ordre venant d’en haut… sans que je ne sache vraiment d’où. Il est vrai que ce dispositif a un côté très voyeur et intrusif, surtout quand on ignore sa présence. D’après Olivier Arsac, l’adjoint au maire chargé de la sécurité, « ça marche et c’est plus doux qu’une verbalisation ». Ce dispositif, qu’il qualifie de « drôle et original », pourrait s’étendre à plusieurs endroits de la ville.

Reportage sur les nouveaux dispositifs de la Daurade à Toulouse
© France 3 Occitanie

Or, tous ces dispositifs de surveillance posent des questions de l’ordre de l’éthique. L’algorithme de détection de la société IBM risque-t-il de démultiplier les discriminations structurelles déjà subies par celles et ceux qui vivent dans les quartiers pauvres ? Par ailleurs, il soulève un autre problème : le risque de faux-positifs dans la détection des comportements suspects et des infractions.

Par ailleurs, il semblerait que le recours à ce type de dispositifs, toujours plus performants, se généralise partout sur le territoire français. Par exemple, lors du dernier carnaval de Nice, la reconnaissance faciale a été testée sur des volontaires. À Saint-Etienne, il y a même eu un projet pour expérimenter l’audio-surveillance afin de détecter les bruits suspects, avant d’être annulé sur avis de la CNIL. Sur le plan de la liberté d’expression, d’opinion, de conscience, de circulation, de manifestation, le projet pose également question, tant la surveillance des foules est mise en exergue.

Pour dénoncer les dérives de la surveillance massive dans le contexte des smart cities, la Ligue des Droits de l’Homme a lancé en 2019 la campagne Technopolice, ainsi qu’une plateforme ayant pour but de documenter le déploiement des projets de surveillance à travers le pays. L’autre enjeu de cette campagne est de parvenir à organiser des résistances locales, en les fédérant.

Ces dispositifs de surveillance, tels qu’on a pu les voir, posent des questions sur nos libertés individuelles : pourra-t-on se joindre à un événement culturel ou une réunion politique sur la voie publique sans risquer d’être fiché ? Autoriserons-nous partout en France la reconnaissance faciale ?

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